Éditions GOPE, 352 pages, 13 x 19 cm, 20 €, ISBN 979-10-91328-15-9

lundi 30 mars 2015

Jeff de Pangkhan, l’interview

Gope : Bonjour Jeff, merci de te prêter à l’exercice de l’interview. Ton premier roman, Un os dans le riz, qui est en souscription pendant tout le mois d’avril chez ton éditeur, va donc paraître au mois de mai, ce qui nous laisse encore un peu de temps pour te présenter à ceux qui ne te connaissent pas encore.
JdP : Bonjour David ! Avec plaisir !

Jeff de Pangkhan, mars 2015.

Gope : Tout d’abord, Jeff de Pangkhan est un pseudonyme, n’est-ce pas ?
JdP : Oui, tout à fait ! Mon prénom, Jean-François, a toujours été un obstacle en Asie lorsque les gens voulaient m’appeler. Pangkhan est le nom du village qui m’accueille depuis presque 15 ans ! Il faut d’ailleurs prononcer « Pang Khanne »… une autre difficulté, mais dans le sens Asie-Europe cette fois !

Gope : Quelle est la taille de ce village ?
JdP : C’est un village traditionnel de 300 maisons, deux temples, une école, un dispensaire ; environ 800 à 900 personnes y habitent. Ah ! J’oubliais, il y a aussi 3 restaurants (dont celui de ma femme) et 7 épiceries !

Gope : Je peux donc supposer que ce village a servi de modèle au Ban Hey de ton roman ?
JdP : Oui et non, parce que Ban Hey existe vraiment, c’est un village (ban en thaï) qui se trouve à proximité de Ban Pangkhan ; j’ai fait un mix des deux !

Canton de Selaphum

Gope : Combien d’Occidentaux vivent à Ban Pangkhan ?
JdP : Euh… aucun à ma connaissance ! Ah si, pardon, moi !

Gope : Et combien de Franco-Thaïs comme Prik, notre inspecteur des rizières ?
JdP : Un seul, mon fiston qui a les deux passeports. Ma fille, je l’élève depuis qu’elle a l’âge de deux ans et demi, mais c’est ma fille officiellement…

Gope : C’est donc à Ban Pangkhan, en Isan, dans le Nord-Est de la Thaïlande, que tu vis depuis une quinzaine d’années ?
JdP : Tout à fait… je me suis juste absenté six mois, en 2006, à l’occasion de la naissance de mon fils, il est né en France, à Nantes…

Gope : Ah ah ah ! Ce bon vieux droit du sol !?
JdP : Eh eh ! Il fut français avant d’être thaï !

Gope : Comment as-tu été accueilli à ton arrivée au village ?
JdP : Comme le premier étranger à fouler la latérite locale… une fête inoubliable de plusieurs jours… j’ai été présenté à chaque personne du village !

Gope : Parles-tu le dialecte du coin ?
JdP : Je crois me débrouiller… je le comprends…

Gope : Et les villageois, ils te comprennent ?
JdP : J’espère…

Gope : En tout cas, il n’y a eu aucun quiproquo trop grave !
JdP : Je n’en ai pas le souvenir, non pas de quiproquo. Lorsqu’il y a une difficulté au cours d’une conversation un peu plus technique que celle du quotidien, on prend le temps, on use du langage corporel comme le font les gens d’Isan entre eux !

Gope : As-tu des amis isans ? Te sens-tu intégré ou restes-tu toujours un corps étranger, toléré mais pas plus.
JdP : Oui, j’ai des amis, la plupart font partie de la famille proche ou lointaine. Le village a été fondé par trois familles, je suis donc ami avec au moins un tiers du village. Mais j’en ai aussi dans la ville de Selaphum, la capitale du district qui sert aussi de cadre à un épisode de Un os dans le riz ! Autrement, il est vrai que je suis et serai toujours un « Farang », mais ce terme n’est pas péjoratif.
On m’appelle d’ailleurs très souvent le « Farang-Isan ». inconnus ou proches, on me salue, « phou yai Jeff » ou juste d’un signe. Par trois fois à Bangkok (ça m’a marqué), j’ai rencontré des chauffeurs de taxi qui avaient entendu parler de moi ou qui m’avaient croisé sur la route du village, comme quoi le monde est petit ! Enfin, une chose est sûre, de Selaphum au dernier village au bout de la route qui mène à la Mae Nam Yang, tous me connaissent, mais l’inverse n’est pas vrai !

Gope : « Amis » ou simplement copains. L’amitié requiert une forme d’intimité qui passe par le fait de pouvoir exprimer ses idées, ses sentiments ?…
JdP : Il y a les deux, comme partout, non ? J’ai des amis et des copains, des Thaïlandais et des Farangs qui vivent alentour.

Gope : Je veux dire, la barrière de la langue, des cultures, etc. n’est-elle pas un frein ? À moins que tu ne soit « décivilisé » ?
JdP : Plus les années passent et plus mon côté farang s’efface, mais mes racines restent, je suis plutôt entier et je ne voudrais pas paraître plus isan qu’un Isan. La culture locale, je l’ai apprise et je continue à en découvrir certains aspects ce qui ne m’empêche pas de partager certains aspects de mon caractère avec mes amis, qui apprécient d’ailleurs, il y a un respect mutuel, allez, je dirais que je suis effectivement un Farang-Isan comme certains aiment à m’appeler !



Gope : Tiens, au fait, quelles sont tes « racines » ?
JdP : Je suis un pur produit nantais, bretonnant même. Tout jeune, une mappemonde sur ma tête de lit me faisait rêver de voyages. Même à l’école, la géo et l’histoire étaient mes matières favorites. Par contre, j’ai quitté l’école plus tôt que prévu, la veille du bac, en 1984, pour travailler. Je voulais de l’argent pour voyager… j’ai commencé à bosser un petit partout en France – Auvergne, Alpes, Paris – j’ai fait une multitude de petits métiers du bâtiment, j’ai été vendeur de sandwichs et de bière dans les festivals et fêtes votives, vendeurs de fruit et légumes et j’en passe, puis je suis parti aux Antilles, à Saint-Barth, une première aventure. De retour en France quelques années plus tard, j’allai sur une autre île, celle de Noirmoutier où j’achetai une affaire de petit train touristique, très lucrative et saisonnière, ce qui m’a permis d’assouvir ma passion, les voyages. L’Afrique et surtout l’Asie ! Ce fut l’Inde tout d’abord et ses pays limitrophes, j’ai même bâti une maison sur la côte d’Oman et puis, un jour, le hasard m’a conduit en Thaïlande, d’abord le bord de mer à Hua Hin, puis le Nord, le Sud, mais jamais l’Isan ; un jour, j’ai croisé ma future femme, elle m’a emmené dans son pays, son pays des rizières à perte de vue ! J’ai adoré le paysage, les gens… Nous nous sommes mariés et après un dernier petit tour en France et la vente de mon affaire, je suis venu m’installé ici, dans la province de Roi Et !

Gope : En deux mots, pourrais-tu qualifier ou commenter ton expérience de mari d’une femme de l’Isan ?
JdP : Liberté et respect mutuel !

Gope : Comment t’es venue l’idée du blog www.jeffdepangkhan.com ?
JdP : Tout d’abord, la possibilité en 2010 de se connecter à internet, même au village, puis tout ce que je voyais, ce que j’avais appris de la culture, des gens, je voulais le partager et puis aussi une furieuse envie d’écrire ! De raconter des histoires…

Gope : Et pour meubler un surcroît de temps libre ou ne pas perdre l’usage du français aussi, peut-être ?
JdP : Oui, entre autres. Les journées se sont ensuite organisées en fonction des sujets qui me venaient spontanément… je partais à vélo arpenter la campagne ; tous les chemins, tous les villages à 30 km à la ronde je les ai inventoriés, j’ai rencontré des paysans dans les champs, discuté avec eux, après j’ai tenté la photo (ce n’est pas mon fort) et en revenant de ces escapades, j’avais déjà le texte en tête… le blog permettait alors de coucher ces idées !

Gope : C’est sur ce blog que tu as publié une première version de Un os dans le riz, sous forme d’épisodes, en suivant la tradition du feuilleton populaire. Quels ont été les réactions ?
JdP : Très bonne… j’ai d’ailleurs laissé les commentaires des lecteurs même si les épisodes ont été depuis retirés du blog !

Gope : Du coup, ça t’a donné envie de chercher un éditeur ? Est-ce que ça été difficile d’en trouver un ?
JdP : Oui et non. J’ai contacté un premier éditeur, un ancien ami d’école, et il a fait traîner, un autre à Bangkok qui ne m’a jamais répondu et puis je pensais aller vers l’autoédition quand un ami en commun m’a parlé de Gope…

Gope : Sans rentrer dans les détails techniques, comment s’est passé l’édition de la version papier ? Quels conseils donnerais-tu à un écrivain débutant ?
JdP : De la patience et de la persévérance, mais surtout une collaboration sans faille avec son éditeur afin d’avancer… Faire des concessions, certes, mais en gardant bien en tête ce que l’on a voulu démontrer dans le récit ! Un équilibre …

Gope : Peux-tu nous décrire ta journée d’écrivain ?
JdP : Je me lève très tôt, 3-4 heures du matin, et après une dose de caféine, j’écris… mais souvent c’est très instinctif ! Je me suis équipé d’un calepin qui ne me quitte jamais et je couche sur papier tout ce qui me vient par la tête, expression, idée, le travail régulier, c’est plutôt lors des relectures… Il m’arrive souvent de ne pouvoir m’endormir, une idée en tête, il faut que j’écrive…

Gope : Comment définirais-tu Un os dans le riz ?
JdP : Une enquête rocambolesque avec en arrière-plan, l’esprit et les coutumes des gens d’Isan, les paysages d’Isan et des personnages au caractère singulier…

Gope : Pour ceux qui aiment bien mettre des étiquettes sur tout, on peut dire que c’est un roman populaire, qu’on désignait péjorativement jusque récemment comme de la « paralittérature »…
JdP : Si on veut… « populaire », ça me va, c’est bien ! D’ailleurs, je pense qu’un certain Victor Hugo écrivait des romans populaires, comme Jules Verne…

Gope : Eh oui, la notion de ce qui est « littéraire » évolue, elle aussi, Frédéric Dard est bien rentré dans la collection Bouquins chez Robert Laffont !
JdP : Un de mes auteurs préférés… cela ne m’étonne guère… une plume au cordeau et un duo de choc… J’adore !


Gope : Tiens, puisqu’on y vient : quel lien de parenté pourrait-on faire entre ton polar et d’autres romans/auteurs connus ? Ce qui m’amène à la question suivante : as-tu un modèle, une référence, un auteur qui t’as inspiré plus qu’un autre ?
JdP : Je suis un fan de Chester Himes, mais, hélas, il n’écrit plus, il nous a quitté, il y a bien longtemps, Fred Vargas évidemment et, dans un style plus littéraire, bien qu’il ait débuté son œuvre avec son fameux inspecteur Llob, Yasmina Khadra… je pourrais en citer encore d’autres, Izzo, Grangé, la liste est longue… Himes est celui qui m’a inspiré le plus, ses deux inspecteurs Ed Cerceuil et Fossoyeur Jones, j’adore !

Gope : Quelqu’un qui ne connaît pas la Thaïlande et encore moins l’Isan peut-il lire Un os dans le riz sans se sentir largué ?
JdP : Oui, bien sûr ! Il peut le lire, l’intrigue est là, c’est d’ailleurs tout d’abord sur elle que j’ai travaillé, et s’il ne connait pas la Thaïlande, il aura l’occasion de la découvrir, mon éditeur (oh, oh ! ) m’a aidé à simplifier certains détails pour que tous les habitants de la planète puisse lire Un os dans le riz, enfin tous les habitants, les francophones tout d’abord, tu n’as pas déjà l’intention de me faire traduire ?
Gope : Non, ça dépasse mes capacités…

Gope : Bon, parlons de choses sérieuses ! Chang, Singha, Leo ou Archa, quelle est la meilleure ?
JdP : La Chang, sans hésiter, mais à la longue, elle déglingue les neurones, alors, pour durer, la Singha…



Gope : Alléluia !
JdP : Amen !

dimanche 22 mars 2015

Une difficulté imprévue

En attendant de passer aux choses sérieuses, permettez cette petite digression étymologique au sujet du titre du roman policier de Jeff de Pangkhan : Un os dans le riz.

Ça a à voir avec la potée… Mais pas seulement !… 

Comment la touille qui était restée dans la potée vendéenne en train de mijoter dans une marmite au coin du feu a fini par devenir une expression populaire, nul n’en est sûr, toujours est-il que « y a une couille dans le pâté » veut dire qu’il y a une difficulté imprévue, un os… justement.

Remplacez la Vendée par l’Isan, la soupe aux choux par le khao niao et on obtient « y a un os dans le riz » !



« Il faisait vraiment chaud et des nuages chargés menaçaient, il fallait se dépêcher d’en finir […]

Il restait encore deux allers-retours lorsque Prik, les mains dans la boue, sentit une pierre qui risquait d’endommager sa Ferrari des rizières et l’obligerait sûrement à faire de la soudure sur les lames de la machine.

— Stop ! hurla-t-il. »



Bien sûr, la macabre découverte faite par Prik va retarder les plans nuptiaux de Pim ; du coup, y a aussi un os dans la noce et cette fois, il nous faut remercier Frédéric Dard !

vendredi 13 mars 2015

Prik, l’inspecteur des rizières

Le roman Un os dans le riz de Jeff de Pangkhan est quasiment prêt à être commercialisé. En attendant, voici la couverture complète :

Crédit photographique couverture : © Jari Anttonen, 2014.

UN OS DANS LE RIZ
Une enquête de l’inspecteur Prik

Louis Grives, surnommé Prik, est un ex-policier du 36, quai des Orfèvres qui a pris une retraite forcée dans le village natal de sa mère, au fin fond du Nord-Est de la Thaïlande. Aidé de ses cousins Sou et Sout pour les travaux agricoles, aimé de sa voisine, la belle et gracieuse Pim, il s’est fait à cette nouvelle vie rurale empreinte de nonchalance. Mais lorsqu’on découvre de mystérieux ossements lors des labours de mai, le naturel reprend le dessus et Prik devient « l’inspecteur des rizières ».

Assisté de Prakash et Vihar, ses deux meilleurs amis, officiers de la police royale, il mènera ses investigations dans la trépidante Bangkok et la sulfureuse Pattaya.

Très vite, les trois compères vont se confronter à la discrète et puissante Confrérie, une organisation mafieuse qui a des ramifications jusque dans les plus hautes sphères du pouvoir et qui voit cette enquête d’un mauvais œil, car elle pourrait bien contrecarrer ses plans…

Jeff de Pangkhan

Originaire de Nantes, Jeff réside avec femme et enfants depuis une quinzaine d’années en Thaïlande. Il est connu localement pour son blog où il chronique librement et avec bonhomie la vie des gens d’Isan.